Jonas Vingegaard, le coureur cycliste danois, s’est forgé une place inoubliable dans l’histoire du cyclisme en remportant de manière spectaculaire le Tour de France 2023 pour la deuxième fois consécutive. Se parant du maillot jaune dès la 6ème étape, il a su tenir tête à une concurrence intense, notamment du précédent champion, Tadej Pogačar, pour maintenir cette position de leader jusqu’à la fin de la course. Avec cette victoire, Vingegaard devient le premier Danois à triompher dans la Grande Boucle depuis 1996, marquant ainsi une étape majeure pour le cyclisme de son pays. Sa détermination et son travail acharné illustrent une leçon de persévérance pour les jeunes cyclistes du monde entier, prouvant que les rêves les plus audacieux peuvent être réalisés. Retour sur trois semaines de compétitions.
Pogacar n’a-t-il pas trop forcé en début de Tour ?
Le Tour de France a démarré sur les chapeaux de roues, avec des premières étapes particulièrement éprouvantes. Le coup d’envoi a été donné dans une ambiance électrique au Pays basque espagnol. D’emblée, les ultra-favoris, Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard, se sont livrés à un duel passionnant. Tadej Pogacar a pris l’initiative, cherchant à grappiller des secondes de bonification à chaque opportunité. C’est pourtant Adam Yates, coéquipier de Pogacar, qui a triomphé lors de cette première étape.
La deuxième étape, qui rappelait la Classique de Saint-Sébastien ayant lieu chaque année fin juillet, a tenu toutes ses promesses. Alors qu’une dizaine de coureurs franchissaient sous la flamme rouge, Victor Lafay a lancé une attaque audacieuse. En solitaire sur le dernier kilomètre, il a été le seul Français à remporter une étape de ce Tour, s’imposant ainsi à Saint-Sébastien.
Pendant ce temps, Neilson Powless se distinguait sur les routes du Tour. Ayant pour objectif le maillot à pois, il a pris part aux échappées lors des étapes qui lui étaient favorables, brandissant fièrement les bras au sommet des côtes. Cependant, comme nous allons le faire pour Pogacar, nous sommes amenés à nous demander si Powless n’a pas trop donné lors de ces premières étapes.
Les Français de l’équipe Arkéa-Samsic ont également marqué cette édition, avec Laurent Pichon qui s’est illustré sur la troisième étape, et Simon Guglielmi sur la septième.
Les Pyrénées et après…
Au pied des Pyrénées, la situation reste inchangée : Yates porte le maillot jaune, Powless le blanc à pois rouges. La cinquième étape marque un tournant, avec Jai Hindley, vainqueur du Tour d’Italie en 2022, qui s’empare du maillot jaune à l’issue de l’étape. Il parvient à se faufiler hors de la surveillance des favoris. Vingegaard riposte et lance également une attaque, prenant presque une minute d’avance sur Tadej Pogacar. Le Tour semble être joué, mais le lendemain, Tadej Pogacar réplique par une attaque incisive et s’offre la victoire à Cauterets-Cambasque. L’écart se resserre et Pogacar rattrape le temps perdu. Jai Hindley, distancé en milieu d’étape, cède le maillot jaune à Jonas Vingegaard.
Pendant ce temps, Jasper Philipsen réalise un exploit exceptionnel en remportant la troisième, la quatrième, la septième et la onzième étape. Qui l’aurait cru ? Si aucun sprinteur ne dominait clairement le monde professionnel au début du Tour, à ce stade de la course, Jasper Philipsen est incontestablement le meilleur sprinteur mondial, épaulé par le meilleur poisson-pilote du monde, Mathieu Van der Poel. Le rôle du poisson-pilote est de mener à vive allure son sprinteur jusqu’au sprint final. Malgré certaines victoires assez disputées, il est couronné vainqueur de quatre étapes et s’est même imposé lors du sprint des Champs-Élysées l’année précédente.
La question qui se pose désormais est la suivante : qui pourra détrôner Jasper Philipsen après ces trois victoires ? Eh bien, lors de la huitième étape, la veille du passage au Puy-de-Dôme, c’est Mads Pedersen qui tire son épingle du jeu et remporte la victoire d’étape, devançant un Jasper Philipsen plus que jamais vêtu de son maillot vert.
Retour au Puy-de-Dôme
S’il était attendu un duel intense entre les favoris au sommet du Puy-de-Dôme, les organisateurs ont pu être quelque peu déçus. Et ce, dès le début de l’étape, lorsque le peloton comprenant les favoris a laissé une avance d’environ un quart d’heure à l’échappée. Ils ont rattrapé le retard dans les pentes vertigineuses du Puy-de-Dôme, où Pogacar a lancé une attaque, récupérant quelques précieuses secondes, de la même manière qu’à Cauterets-Cambasque.
Quant à l’échappée, c’est Michael Woods qui s’est imposé, devançant un Pierre Latour particulièrement impressionnant ce jour-là. Les favoris sont arrivés avec 8 minutes de retard. Romain Bardet n’a pas pris part à la fête, se trouvant dans le peloton. Son équipe a même tenté de combler l’écart, sans succès. Tadej Pogacar se trouve désormais à seulement 17 secondes de Vingegaard, se rapprochant dangereusement du maillot jaune.
Après une journée de repos bien méritée, la dixième étape s’est révélée particulièrement ardue. Avec son profil très vallonné, les puncheurs se sont fait plaisir, couronnés par la victoire de Pello Bilbao, au terme d’un sprint en petit comité. Les mêmes puncheurs ont réitéré leur performance lors de l’étape reliant Roanne à Belleville-en-Beaujolais, où Ion Izagirre s’est imposé après 31 kilomètres en solitaire.
Une longue semaine dans les Alpes
Un programme exigeant attendait les coureurs dans les Alpes, à commencer par le Grand Colombier. À l’instar du Puy-de-Dôme, la confrontation entre les favoris n’a pas été aussi intense que ce que les organisateurs avaient espéré. C’est Michal Kwiatkowski qui s’est imposé lors de cette étape, pendant que Pogacar parvenait à grappiller quelques précieuses secondes sur Jonas Vingegaard. L’écart n’étant plus que de 9 secondes, le suspense est à son comble pour la suite de cette aventure alpine.
L’étape entre Annemasse et Morzine, semée de nombreuses difficultés, a également été le théâtre de divers litiges, principalement en raison de la présence des motos. En effet, ces dernières ont entravé une offensive de Tadej Pogacar dans la dernière côte, le col de Joux Plane. Jonas Vingegaard a réussi à récupérer les secondes de bonification au sommet du col. Toutefois, dans la descente, Carlos Rodriguez et Adam Yates reviennent sur les deux échappés, malgré les difficultés occasionnées par… les motos. Carlos Rodriguez a lancé une attaque dès le début de la descente et a franchi la ligne d’arrivée en première position. Tadej Pogacar, terminant deuxième, a empoché des secondes de bonification. L’écart reste donc de 10 secondes, marquant ainsi une étape hautement disputée.
À peine une étape difficile achevée, qu’une autre débute le lendemain, entre Les Gets et Saint-Gervais. Les favoris, épuisés par la veille, peinent à s’affronter. Une échappée significative se profile alors, avec Wout Poels qui parvient à s’imposer au sommet de Saint-Gervais, suivi de près par le très polyvalent Wout Van Aert, aussi performant au sprint qu’en montagne. Des coureurs français se sont également illustrés lors de cette étape. Tadej Pogacar et Jonas Vingegaard franchissent la ligne d’arrivée côte à côte, ne se lâchant pas d’une semelle. Le prochain grand rendez-vous est donc fixé pour le contre-la-montre de mardi.
Des performances incroyables
La tension était palpable lors du contre-la-montre. Au sein du peloton, Pogacar était perçu comme le favori, mais Vingegaard, prenant le départ deux minutes après le Slovène, disposait d’un avantage psychologique : il avait accès aux écarts de temps en temps réel et, sur certaines portions, il pouvait voir Pogacar en ligne de mire.
Cet avantage psychologique a finalement porté ses fruits, car Vingegaard s’impose avec une avance de 1 minute et 38 secondes sur Pogacar. Autrement dit, il voyait Pogacar juste devant lui avant la ligne d’arrivée. Après l’étape, de nombreux doutes se sont installés. Vingegaard a réalisé le contre-la-montre à plus de 41 km/h, Pogacar à 39 km/h, tandis que 13 autres coureurs ont terminé à 37 km/h. En d’autres termes, certaines performances stratosphériques ont suscité de nombreux questionnements.
Vingegaard a certes pris une avance conséquente, mais le Tour n’était pas encore terminé. Le lendemain, Pogacar a montré des signes de faiblesse, avant la montée du Col de la Loze, lors de l’étape se terminant à Courchevel. Vingegaard en a profité pour gagner du temps, sans même avoir à attaquer. Felix Gall s’est imposé à Courchevel après avoir brillé sur les pentes ardues du col de la Loze. Jonas Vingegaard arrive avec un retard de 1 minute et 52 secondes, et Pogacar… 7 minutes et 37 secondes ! Vingegaard a asséné un véritable coup de massue lors de ce Tour.
Les Vosges
Les deux étapes suivantes n’ont pas été à la hauteur des attentes de Jasper Philipsen. Ces deux étapes, qui semblaient lui être promises, ont été remportées par les échappés. À Bourg-en-Bresse, l’écart maximal entre l’échappée et le peloton était de 1 minute et 30 secondes, et c’est finalement Kasper Asgreen qui l’emporte pour l’échappée, dans ce qui ressemble à une victoire totale des échappés. Le lendemain à Poligny, c’est Matej Mohoric qui s’impose pour l’échappée.
Nous avons presque oublié de mentionner la retraite de Thibaut Pinot à la fin de la saison. Son groupe d’Ultras-Pinot a décidé de créer le « virage Pinot », réunissant des milliers de personnes sur ses terres d’entraînement. Les images montrent bien ce qu’est Thibaut Pinot, ce n’est pas un cycliste avec un grand palmarès, mais comme Raymond Poulidor, il est très apprécié pour les émotions qu’il a su offrir à son public. Il passe seul en tête dans son virage, mais sera finalement rattrapé par Pogacar qui finira par remporter l’étape.
Aux Champs-Elysées, c’est Jordi Meeus, sorti de nulle part, qui s’impose, et Jasper Philipsen qui n’aura pas réussi à récupérer les deux étapes qu’il a laissées aux échappées.
Vingegaard trop fort ou Pogacar pas assez fort ?
Les défaillances de Pogacar peuvent s’expliquer assez facilement : tout d’abord, il a eu une préparation perturbée. Suite à sa chute lors de la course Liège-Bastogne-Liège, il a passé plusieurs semaines sans s’entraîner, n’effectuant qu’une journée de course avant le Tour (le championnat de Slovénie, qui n’est pas une grande compétition). De plus, il est possible qu’il souffrait de douleurs au poignet pendant le Tour.
Un autre facteur de défaillance est qu’il a affirmé en 2022 ne pas bien supporter la chaleur. Il s’est imposé lors des étapes les plus fraîches du Tour (autour de 20°C) et a eu du mal à suivre lors des étapes les plus chaudes (plus de 30°C), notamment lors du contre-la-montre.
Enfin, Vingegaard était peut-être tout simplement trop fort cette année. Bien que certaines suspicions existent, il ne faut pas oublier le milieu du Tour, où Vingegaard n’a pas réussi à suivre Pogacar. Peut-être s’agissait-il d’une stratégie pour donner à Pogacar un avantage psychologique ?